"Puits Couriot. La
machine d'extraction électrique"
Les fantômes produisent leur
propre énergie. C'est mal dit. Les fantômes engendrent l'énergie qui leur est
nécessaire. Je sais mal le dire. Les fantômes sont leur énergie. Ne mangent
pas, n'ont pas de colère, les fantômes sont l'énergie qui leur est suffisante.
Leurs besoins en déplacements, en apparitions ne sont nourris que par eux. Si un
fantôme m'est utile, je ne peux pas provoquer sa venue ni aucun des gestes
qu'il aurait pour moi. Je ne sais pas quand il sera là, je ne sais pas les
gestes qu'il fera, qu'il ne fera pas. Il peut, et c'est déroutant, agir dans un
passé différent du mien. Non, je dis encore mal : dans un présent différent du
mien, ça n'aide guère. Je me représente alors un fantôme comme un âne dans une
noria, tournant aveugle pour puiser l'eau qu'il boira. Quand je serai cet âne,
je veux avoir parfois la mémoire d'avant. Ou d'un autre avant, pour qu'il n'y
ait pas seulement la soif, pas seulement la ronde, mais fugitivement,
modestement, une histoire commune avec ce qui reste, dans le passé qui est un
présent. Je le dis mal.
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